[Kosmos BoL] (Mythologie grecque) Le jour où les aèdes balbutièrent 1
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Voici un compte-rendu d'une partie-test de Kosmos BoL (qui utilise les règles de Barbarians of Lemuria avec des règles additionnelles). Il teste le scénario Le jour où les aèdes balbutièrent, un scénario court orienté "enquête et embrouillamini divin" que j'ai écrit pour le futur supplément Delphes et la Phocide. Les PJ viennent à Delphes pour participer à un concours de poésie épique en l'honneur d'Apollon, mais rien ne va se passer comme prévu.
Type de partie : scénario prévu pour une ou deux séances. Le scénario était prêt et je pouvais improviser, mais c’était l’occasion d’un « crash test » pour voir ce qui manquait dans le matériel écrit que je prévoyais d'inclure dans le supplément.
Durée : une soirée courte, divisée en son milieu par le dîner. Début à 19h environ, 1h30 de jeu avant le dîner pour l’introduction et la première scène du scénario, puis reprise autour de 21h30-21h45 et jeu jusqu’à presque 23h. Deux joueurs devaient reprendre le RER et le métro pas trop tard (mauvaise circulation en ce moment). En tout, un peu moins de 3h de jeu.
Personnages joués : trois personnages prêts à jouer du livre de base : Euménès le vieux roi meneur de char, Bélos le prince archer, Hagias l’aède (livre de base), plus un personnage créé par une joueuse : Hypatie, prêtresse d'Apollon à Delphes.
Les liens entre les PJ. Nous commençons à jouer sans introduction sur l’univers ou les règles, que tout le groupe connaissait déjà à peu près. En revanche, nous décidons comment les PJ se retrouvent à Delphes et comment les autres connaissent Hypatie. Le groupe décide que Pyrrha, la sœur de Bélos, a été malade et qu’Euménès et Bélos sont allés à Delphes afin de consulter Apollon, ce qui a conduit à la guérison de Pyrrha. C’est au cours de ce voyage qu’ils ont fait connaissance avec Hypatie et se sont liés d’amitié avec elle.
Cette fois, Euménès et Bélos sont de retour à Delphes en compagnie de leur aède, Hagias, qui compte prendre part au concours de poésie épique qui se déroule au sanctuaire tous les quatre ans. La victoire signifierait un grand honneur pour la ville d’Aïdoné. Euménès et Bélos sont accompagnés de plusieurs serviteurs (ces derniers ne joueront pas de rôle particulier dans cette aventure, les PJ préférant agir eux-mêmes).
Un concours de poésie épique à Delphes. Les PJ ont débarqué à Cirrha avant de faire à pied le chemin jusqu’au sanctuaire de Delphes. Ils y arrivent dans l’après-midi. La foule s’est réunie dans l’enceinte du sanctuaire, dominée par les hautes colonnes du temple d’Apollon et ses ornements vivement colorés de bleu et de rouge.
Le premier candidat, Grémion de Corinthe, s’avance et commence à jouer sur sa phorminx, mais reste coi et se retire, honteux.
Hagias s’avance à son tour. Je fais faire le jet à la joueuse : c’est une réussite. L’aède joue sans problème, mais j’annonce à la joueuse qu’au moment de chanter, aucun mot ne lui vient.
Mégara de Lesbos, la troisième candidate, rencontre le même problème, et après elle la quinzaine d’autres candidats. « La Muse nous a abandonnés ! » murmurent-ils.
La mission. La prêtresse Hypatie et les autres PJ réconfortent Hagias, puis le grand prêtre d’Apollon, Euphronios, annonce l’ajournement de l’épreuve, le temps de tirer l’affaire au clair. La foule commence à se disperser et déjà les rumeurs vont bon train.
Hypatie se souvient qu’aucun problème n’avait été décelé lors des sacrifices précédant la cérémonie. Euphronios, qui a reconnu les PJ après avoir entendu parler de leurs précédentes aventures, leur confie son embarras et leur demande de se renseigner, notamment auprès des autres candidats, qu’il ne peut pas interroger lui-même de peur d’enfreindre l’impartialité nécessaire du jury du concours de poésie.
Les PJ essaient de déceler un mensonge ou une dissimulation dans l’attitude d’Euphronios. Bélos, qui a l’avantage « Perspicace », réussit un jet d’esprit : le grand-prêtre est sincère.
En questionnant Euphronios, les PJ apprennent que, comme d’habitude, les prêtres et prêtresses d’Apollon avaient consulté le dieu, examiné les présages, les entrailles des victimes sacrificielles, etc., mais n’avaient rien constaté d’anormal. Apollon n’avait pas l’air pas en colère. La Pythie n’a pas non plus reçu de vision particulière. Euphronios est désemparé.
L'enquête. Les PJ décident de commencer par offrir un sacrifice à Apollon devant le temple, avec l’aide d’Hypatie. Contre un petit bijou de faible valeur qui fait partie des possessions d’Euménès, ils troquent un mouton à l’un des bergers qui tiennent leurs troupeaux près de l’enceinte du sanctuaire à l’usage des pèlerins venus consulter l’oracle ou accomplir des rites. Tout se passe bien et les entrailles de la victime sont normales.
Comme le soir tombe, Hypatie, qui loge au village de Crissa à un quart d’heure de marche du sanctuaire, offre l’hospitalité aux autres PJ. Dans la lumière rasante du soleil couchant qui brille devant eux, à demi masquée par le flanc de la montagne, les PJ suivent le sentier qui longe les terrasses escarpées jusqu’aux maisons du village. La demeure d’Hypatie est modeste mais confortable. Tout juste installés grâce à leurs serviteurs, les PJ repartent afin d’interroger les autres candidats malheureux du concours. Eux aussi logent au village.
Grémion de Corinthe est logé chez un prêtre d’Apollon, un nommé Clastès, grand, maigre, réservé et bougonnant, peu disposé à se laisser amadouer par des étrangers. Hagias et les autres réconfortent le vieil aède effondré. Ce dernier leur décrit ce qui lui est arrivé : la même chose qu’à Hagias. « La Muse me méprise », murmure-t-il, contrit.
Les PJ se demandent depuis combien de temps le problème a pu commencer. Grémion, comme Hagias, n’avait pas travaillé son chant épique depuis plusieurs jours, à cause du voyage. Mais le problème semble remonter à quelques jours seulement.
En discutant, les PJ portent leurs pensées vers les Muses : ce sont elles qui inspirent les aèdes. Hagias, grâce à un jet d’esprit réussi, se souvient des attributions exactes de chacune des Muses. C’est la Muse Calliope qui s’occupe de la poésie épique. Il a dû lui arriver quelque chose. Mais est-elle la seule concernée, ou bien toutes les Muses sont-elles affectées ?
Les PJ vont interroger Mégara de Lesbos, qui loge chez Callibothrys, une Thyiade (prêtresse de Dionysos à Delphes). Cette dernière, qui a séché en hâte ses pleurs pour les accueillir, leur explique à son tour le même problème. Rentrée chez Callibothrys, Mégara a réessayé de chanter plusieurs airs. Elle s’est rendu compte qu’elle était incapable de chanter des poèmes épiques, mais que son inspiration restait intacte pour les autres domaines de la poésie et de la musique : les poèmes d’amour ou les chansons enfantines, par exemple. Les PJ en concluent qu’il est arrivé quelque chose à Calliope.
Un berger de rêve. Les PJ tâtonnent alors pour savoir comment contacter Calliope et les Muses. Grâce à Hypatie et à Grémion, ils décident tout simplement d’adresser une Prière à la Muse en lui demandant de leur envoyer un signe.
Rien ne vient dans l’immédiat.
Les personnages finissent par rentrer chez Hypatie et aller se coucher. Mais pendant la nuit, Hagias voit en rêve Calliope, qui lui indique : « Demain au lever du jour, un jeune berger se présentera au village. Tu devras lui faire bon accueil. »
Hagias se réveille et met les autres PJ au courant. Postés sur le pas de la porte et aux fenêtres de la maison d’Hypatie, les PJ guettent l’arrivée d’un berger. Ils voient arriver un berger accompagné de quelques moutons. Il se dirige vers la maison, demande à rencontre Hypatie, Euménès, Bélos et Hagias.
Intimidé, le nouveau venu se présente sous le nom d’Argydès, simple berger. Accueilli avec hospitalité par les PJ, il leur raconte une histoire qu’il ose à peine croire lui-même. Simple berger sur les flancs du mont Parnasse, comme son père et son grand-père avant lui, il a rencontré il y a quelques semaines une belle jeune femme dans la montagne. Ils se sont rencontrés plusieurs fois et sont tombés amoureux. Un jour, la belle jeune femme lui a appris qui elle était réellement : Calliope, l’une des Muses. Mais depuis ce jour-là, il ne l’a plus revue. Jusqu’à un rêve qu’il a fait hier. Calliope lui est apparue et lui a appris qu’elle a été enlevée par le dieu Apollon, amoureux d’elle et jaloux d’Argydès, qui la retient sur l’Olympe !
Tout le monde tombe des nues, à commencer par Hypatie : aucun signe divin, ni aucune vision de la Pythie n’avaient appris cette histoire aux prêtres d’Apollon. Le dieu cache donc parfois des choses à son propre oracle !
Vers la solution ? Les PJ commencent par recommander la prudence à Argydès, qui risque d’être la cible de la jalousie d’Apollon. Ils se mettent aussitôt en devoir de trouver une solution à cette situation pour le moins délicate… Ils envisagent de s’adresser à Mnémosyne, la mère des Muses, ou à Létô, mère d’Apollon. Ils se fixent finalement sur Zeus, le père du dieu, qui devrait pouvoir le convaincre de libérer Calliope. Si la Muse de la poésie épique reste emprisonnée, aucun poète ne pourra plus chanter la gloire des héros et des héroïnes ! Il est donc urgent d’organiser un prestigieux sacrifice à Zeus, avec des prières pour la libération de la Muse muette.
Dénouement. Comme deux des joueurs devaient rentrer chez eux pas trop tard, nous avons discuté et décidé de conclure le scénario en quelques mots, puisque les PJ avaient résolu l’essentiel des difficultés.
Hypatie expose donc l’idée des PJ au grand-prêtre Euphronios, qui l’approuve. Le jour levé, les prêtres et prêtresses, auxquels se joignent les candidats au concours de poésie épique, assistent à un grand sacrifice de moutons et adressent une vibrante prière à Zeus pour l’implorer de convaincre Apollon de libérer la Muse Calliope. Hypatie suggère d’offrir aussi des fruits à Zeus. Les autres PJ jugeant l’offrande insuffisante, elle a l’idée de mêler du miel au jus extrait de la pulpe des fruits afin de composer une pâtisserie sucrée : elle accomplit ainsi son élément de destin « Première inventeuse » (qui consiste à être le ou la première à inventer un élément de civilisation, technique, institution ou coutume) en inventant… la pâte de fruits. (Ou, plus vraisemblablement, l’un de ses équivalents antiques, sortes de fruits confits.)
Moins d’une heure après, les aèdes retrouvent l’inspiration.
Par prudence, le grand-prêtre Euphronios décide toutefois de reporter le concours à l’année suivante, afin de laisser le temps à l’affaire de se décanter.
Hagias et les aèdes, quant à eux, ont à présent un hymne à Apollon et un hymne à Zeus à composer.
Une théophanie. La nuit suivante, tous les PJ font le même rêve : les Muses au grand complet – les PJ reconnaissent parmi elles Calliope – leur apparaissent et les invitent à gravir le Parnasse jusqu’à son sommet le plus proche du sanctuaire, au sud. Après une ascension longue et harassante, mais sans encombre, les PJ parviennent sur la cime sud du Parnasse. Après une attente anxieuse, ils voient venir à eux neuf jeunes femmes très belles, dans lesquelles ils reconnaissent les Muses. Une dixième femme, plus âgée, les accompagne : Mnémosyne, dont le visage paraît sans âge, et qui fixe les PJ avec un calme troublant, d’un regard d’une profondeur infinie où se devine un savoir incommensurable. Cette vision impressionnante fait perdre 2 points de démesure aux PJ. Les Muses remercient les personnages, puis leur touchent le visage en souriant, avant de s’évanouir purement et simplement dans les airs. Comme dans un rêve, les PJ reprennent le chemin de Delphes. Ceux qui n’avaient pas l’avantage « Artiste » l’ont acquis ; quant à Hagias, qui l’avait déjà, il a gagné 1 point dans la carrière « Aède ». De retour au sanctuaire, les PJ sont remerciés par Euphronios.
L’amitié entre la famille royale d’Aïdoné et la prêtresse Hypatie sort renforcée de cette aventure. Les PJ bénéficient de la confiance du grand-prêtre d’Apollon à Delphes, ce qui n’est pas rien. Ils ont gagné la bienveillance des neuf Muses et de Mnémosyne. Le dieu des dieux en personne a approuvé leur requête. Tout semble se terminer au mieux…
… reste à savoir comment réagira Apollon.
Après cette séance, plusieurs fils narratifs restent pendants. Comment va réagir Apollon ? S’en prendra-t-il à Argydès par dépit ? En voudra-t-il aux PJ, à Euphronios ? Les prochaines aventures des PJ le diront peut-être !
Bilan de maîtrise :
Points de règle utilisés :
- Jets d’action simples, parfois avec dés de bonus (joués correctement : on lance 3 dés et on garde les deux meilleurs résultats).
- Jet de l’aède pour créer une œuvre d’art (un poème épique). Jet utilisé : points d’esprit + points de carrière d’aède – difficulté difficile (-2).
- Prières.
- Accomplissement d’un élément de destin d’un PJ (« Premier inventeur », avec Hypatie).
Au chapitre des frustrations :
- On a dû franchement écourter la fin. Normalement, les Muses auraient demandé en rêve aux PJ de venir les rejoindre sur le Parnasse afin de discuter avec eux des moyens de dissuader Apollon, lequel aurait été un peu plus têtu. Mais, au niveau de la soirée, c'était plus sympathique de terminer là, car les PJ avaient résolu les principaux ressorts du scénario et il n'y avait pas vreaiment de quoi faire une deuxième séance. Là, ils en restent sur une fin à demi-ouverte et se demandent bien ce qu'Apollon leur réserve !
- Je pense tenter de varier les choses afin d'ajouter quelques péripéties à l'enquête et de faire en sorte que l'histoire se résume moins à une série de découvertes d'infos du type "vous devez faire ça". Le groupe n'a pas eu l'air de se sentir trop guidé, cela dit.
Le groupe a bien apprécié la partie et a terminé en proposant déjà une date pour une prochaine aventure de Kosmos. Ouf, ça leur plaît, ça m'encourage bien.
Phrases mémorables de la partie :
- « Est-ce que vous avez quelque chose à offrir en sacrifice dans cette ville ? – Oui, il y a le pigeon à la fenêtre ! » (Allusion à un pigeon qui revient se poser avec insistance à la fenêtre depuis quelques jours.)
- (Les PJ se demandent comment convaincre Apollon de relâcher Calliope.) Hagias : Il faut qu’on lui trouve une autre meuf. Ou un mec. On peut lui proposer Bélos, t’es pas intéressé ? - Bélos : Non ! T’as qu’à le faire, toi.
- Hagias : Ah ben non, mon illustration n’est pas aussi jolie que la tienne. Moi, c’est du… Alma-Tadema. Alors que Bélos, regardez, il est canon (la joueuse montre la feuille de perso de Bélos au reste du groupe, qui approuve).
- (Les PJ accueillent le berger Argydès chez Hypatie.) Hypatie : On peut faire entrer aussi les moutons ? - MJ (sévère) : non.
- Hagias : « Franchement, pour connaître un peu les dieux grecs, Apollon ne vous répondra jamais si vous sacrifiez moins de 100 bœufs. »
- « Mhm… Je vais demander ma mutation pour devenir prêtresse de Zeus. » (Hypatie, à la fin du scénario.)
Changements à apporter au scénario pour le supplément :
- Quand un PJ aède participe au concours et n’arrive pas à chanter alors qu’il devrait réussir son jet : lui faire faire un jet de Mesure (il risque de montrer de la rancœur envers les dieux).
- Ajouter une chronologie des événements passés (pour pouvoir relire d’un coup d’œil en cours de partie depuis combien de jours la Muse a rencontré Argydès et depuis combien de jour elle a été capturée et se tait) et de l’avenir si les PJ ne font rien (par défaut, Apollon fait évidemment un mauvais sort à Argydès).
- Quand on prie Zeus pour lui faire libérer Calliope : indiquer qu’un coup de tonnerre résonne dans le ciel clair, indiquant l’approbation du dieu.
- Idée de fin possible : Zeus approuve la demande des PJ et organise un arbitrage entre les deux amants rivaux de Calliope, où Calliope peut choisir qui elle préfère. Zeus confie à des mortels la tâche d’être témoins et arbitres du conflit. Evidemment, ce sont les PJ qu’il choisit pour ce faire !
Améliorations à apporter aux règles :
Clarifier encore mieux les différents moyens que les PJ ont de communiquer avec les divinités en dehors des Prières. + Pour les Prières ou adresses consistant en des questions, bien préciser ce qu’on peut poser comme question et comment on peut la formuler ou non. Chaque partie confirme un peu plus que les moyens de communication avec les divinités sont ultra-utilisés et doivent avoir une place importante dans les règles.